3 ans presque avec elle

Il y a 3 ans, il fit une presque rencontre qui resta toujours un presque. Il y a 3 ans s'ouvrirent pour lui les portes de l'Enfer. En son abîme il s'abima. Longue était sa cuillère quand il dina avec le Diable, mais il se brula quand même. Dans les flammes infernales, il plongea prêt à bruler jusqu'à son âme. Les démons de la démence l'y attendaient prêts à jouer avec sa raison et sa vie. Face aux tourments de la folie, il s'asseyait, médita et pria son Dieu qui le prit en miséricorde. Alors il fut délivré des murs mais resta enchaîné à ces démons, tel un Job esclave du Diable.

 

Sa vie avait basculé une nouvelle fois. S'il ne voyait plus les démons, il les sentait tout autour. Il croyait avoir ouvert les portes de l'amour, mais c'était une boîte de Pandore. Comme Pandore, il eut le temps de la refermer avant que l'espoir ne s'en envole avec les tourments. On dit l'espoir, mais l'espoir est multiple. L'espoir est espoirs, espoir d'homme, espoir de femme, espoir d'enfant. Les siens espoirs furent presque tous déçus, surtout son plus grand, l'espoir d'une vie simple et normale. Simple et normal, sa plus grande aspiration, Dieu lui a refusé.

 

Cette malédiction céleste est sa croix. En compensation, le Divin lui a confié des dons que beaucoup lui envieraient. Lui les porte comme une presque honte, sachant depuis l'enfance le poids d'être différent. Bien sûr les savoir et se l'entendre dire lui réchauffe par moments le cœur et regonfle son égo parfois en mal d'air. Mais si tôt le bavard corbeau ayant fait son œuvre dans le vent des champs, il dément et fait folie pour égarer la vérité. Il s'en va vers ailleurs fuyant vers un nouvel anonymat. D'une fausse simplicité et de bavardages à la faible raison, il se couvre pour passer inaperçu là où il arrive, tel un fuyard éternel.

 

Mais aussi vite va-t-il, les démons le suivent. Seules prière et méditation le maintiennent à flots. Il était capitaine de navire, le voilà solitaire rameur d'un radeau sans voile, sur l'océan parfois calme, parfois agité, parfois dévorant parties de son frêle esquif. Au milieu de ce désert d'eau salée imbuvable, son Nord, son Étoile Polaire est elle. Sur ce chemin sans retour, il jette moult cailloux blancs, mais tous tombent au fonds de l'océan. De ses veines saignantes, il a tatoué son visage à elle, au naturel, souriant à peine, sur sa poitrine haletante sous sa chemise déchirée. Il sait que de l'océan de la vie nul ne revient jamais et en a accepté l'augure. Certains appellent cela courage. Lui est juste fatigué d'avoir peur et ne le veut plus.

 

Il sait sa vie d'avant. Il sait ses gloires et ses hontes. Dans les flammes infernales mises en miroir, il y a vu sa vie, celle connue comme celle secrète. Il en a dit des parties, des belles et des moins belles. Il en a gardé d'autres, d'autres belles, aussi de ses lâchetés. Mais qui n'en a pas eu ? Qui peut dire qu'il n'en aura plus ? Seul, sur l'esquif fatigué de sa vie qui s'étiole, il regarde l'horizon. Dans la brume du matin, dans le soleil de midi, dans le ciel étoilé de ses nuits blanches, il la voit, partout en tout temps. En sa beauté il se perdra, aux chants des sirènes qui l'attendent au fond de l'océan de la vie. A moins que Dieu ne lui accorde une nouvelle miséricorde, un être à aimer et aimant pour une fin de vie enfin simple et normale.

Vendredi 25 mars 2016, 20h00, quelque part sur les ondes de l'océan de la vie

Brume d ocean

Commentaires

  • E. glaucops

    1 E. glaucops Le 12/11/2017

    Pénitence, abnégation, résignation ou autopunition passive peuvent subtilement servir les desseins de la commisération.
    Ostentations subtiles et mises en scène habiles ne sont-elles pas autant de thrènes ?

    Lorsqu'elles deviennent appel à l'Autre (féminin, divin, extraterrestre...), l'individu se parant du voile trompeur de l'autosacrifice n'est-il pas victime de ses propres mirages ?
    Ces figures ne sont-elles pas une astucieuse invention, une supercherie, inventée par l'esprit ?

    Ne souffrez pas, ne mourrez pas, pour ces projections qui ne sont qu'une forme pernicieuse de glorification de soi-même.

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