Comme un clown d’amour

Comme un clown qui ne se démaquille qu’au soir, je cache derrière mes sourires et parfois mes rires mes sentiments que je ne dévoile qu’au soir. C’est quand le soleil se couche, que la lune de mes rêves apparaît, accompagnée de Vénus étoile d’amour. Alors seul devant le miroir de mon âme, je peux enlever mon maquillage et retrouver mon vrai visage. Sur ce visage, les yeux sont rougis des pleures retenues. La bouche est crispée des silences étouffés. Les rides sont creusées des soucis du quotidien. Puis j’enlève mon grand manteau sous lequel la chemise est sale et trouée. Une fois retirée, elle laisse apparaître les cicatrices du passé ancien ou plus récent. Les grandes chaussures cachent aussi des pieds meurtris d’avoir trop marché, trop attendu, trop s’être fait marché dessus. Puis glisse le pantalon trop grand, taillé dans les rêves démesurés que je fis jeune. Comme eux, il est rapiécé de tous côtés, prêtant à rire ou à pleurer.

Nu, seul, je peux laisser le dos se vouter du poids des ans et des souvenirs. J’esquisse un sourire devant un papillon de nuit qui passe et me rappelle un premier beau souvenir. Dans ce souvenir tu n’es pas encore là, mais sans lui arriverai-je à toi ? Puis je feuillette mon carnet de beaux souvenirs bien cachés dans un coin de ma mémoire, à l’abri du vent et de la pluie. Presque involontairement, ils s’enchaînent jusqu’au premier de toi, cette rencontre qui n’en fut pas une. Puis page après page, tu ne quittes presque plus les lignes de mon carnet de souvenirs. J’ai alors l’impression de redevenir un clown, cette fois, un clown d’amour. Je fais le miroir mimant ta vie, tes joies et tes peines que je fais miennes. Tes colères m’effraient, tes rires me ravissent. Je penche la tête, je cligne des yeux devant ce miroir où tu n’es pas. Alors j’y dessine un grand cœur qui sourit que je veux être toi. Je le caresse comme j’aimerais te caresser. Mes doigts laissent sur la glace des traces de mon amour pour toi. Puis j’embrasse le sourire de ton cœur le réchauffant de la buée de ma bouche marquant la froide glace.

Ainsi mon amour pour toi n’est que traces de mon corps sur le miroir où tu n’es pas. Les déclarations de mon amour pour toi ne sont que des mots lancés au vide de l’abîme de ma chambre d’où tu es absente et qui vont s’écraser sur les murs humides de mes larmes tristes de mon amour solitaire déposées nuit après nuit sans toi. Toi que j’aime, qui es si loin et si près à la fois. Toi que j’ai à portée de main et dont je caresse du bout de mes doigts les déclarations du désir de te posséder. De ces mots jamais dis, souvent sous-entendus, mais jamais détournés, je voudrais en recouvrir ton corps comme d'autant de pétales de roses rouges.

Ainsi en est-il de mes nuits d’amour où mon cœur ne bât plus que pour toi, toi qui même absente ne sort jamais de ma vie. Demain je remettrai mon habit de clown, me remaquillerai, et derrière le cœur de papier que je déplierai pour faire rire les enfants et les tristes, sache qu’il y en a un autre qui bât, qui bât pour Toi.

A Toi, Moi