Noël pour des enfants en terre d'ailleurs

On est en octobre et dans ma boîte-aux-lettres, que je visite de plus en plus rarement, s'empilent le courrier de l'inutile que sont souvent toutes ces publicités. Au milieu de ce tas de forêts mortes en papiers imprimés se trouvent les catalogues de jouets pour nous rappeler que Noël approche et n'est plus très loin. Pour les catholiques est encore plus proche cette période de l'année sacrée qu'est l'Avent. 4 semaines pour se préparer à ce jour du 25 décembre où Jésus serait né selon la légende sacrée. L'Avent dans la tradition récente est marqué par un calendrier sur lequel chaque jour on ouvre une case où se cache un chocolat ou un jouet ou toute autre surprise. Au-delà de l'aspect sacré, Noël est devenu la fête de la famille et la fête des enfants dans le monde entier. Quelque soit le lieu où on habite, sa religion, si on en a une, la période de Noël est l'occasion de joies familiales pour beaucoup. C'est aussi un moment où la solitude vous pèse un peu plus quand vous êtes seul, célibataire, divorcé ou veuf, ou encore migrant ou bien réfugié. Dans cette démarche, cette période de l'Avent est aussi un temps pour penser à tous ces autres qui ont moins de chance que nous et vivent dans une plus grande précarité que nous.

 

Cette année, Noël aura sans doute un goût d'amertume pour toutes ces personnes parties de chez elles par millions, fuyant la guerre, la misère et les persécutions. Naufragés d'un voyage vers un ailleurs toujours espéré meilleur, elles ont échoué sur nos plages et nos rivages avant d'entreprendre à pied, par train, par camion ou par voiture la suite de leur fuite du malheur. Nous les avons vues toute cette année, sur nos écrans de télévision ou électroniques, par cortège ou par petits groupes, trainer leurs espoirs et leur désespoir au milieu de nos champs et nos villes. Nous avons vu aussi les corps de nombre d'entre elles voguer sans vie sur la mer ou laisser sur une plage leur enfance à peine commencée. De toutes ces images nos peines ont parfois fait place à la lassitude que donne l'overdose de malheur, surtout quand ce n'est pas le sien. Lassitude de la misère, lassitude de la violence, lassitude de la mort, lassitude de notre conscience qui peine à se révolter devant l'insupportable devenu supportable par habitude.

 

L'habitude c'est ce que rompe cette période des fêtes de fin d'année où Noël tient une place essentielle. Période de fêtes, période d'union, période de retrouvailles pour s'aimer et se souhaiter plein de chance et de bonheur pour l'année qui vient. C'est aussi l'occasion d'oublier toutes nos peines et misères de l'année le temps d'un moment. Oublier, tous ces migrants vont avoir du mal à oublier, à oublier ce qu'ils fuient, à oublier leurs morts laissés en route, à oublier qu'ils ne sont pas toujours les bienvenus là où ils passent, à oublier que certains veulent les renvoyer vers leur enfer plutôt que partager leur opulence. Partager ! Est-ce si difficile de partager ? Sommes-nous si égoïstes, si corrompus, par une société de consommation qui vante l'opulence que nous ne sachions plus partager avec ceux et celles dans le besoin ? J'ai bien peur que oui. J'ai bien peur que Noël soit l'occasion de se réfugier dans nos maisons chaudes et bien éclairées pour laisser à nos portes ces migrants et réfugiés de guerres nourries des ambitions et des haines, parfois alimentées par nos élites et gouvernants.

 

Il n'est pas question d'aller en confession pour expier une faute dont chacun, individuellement, n'est pas responsable. Il est question de penser à tous ces hommes, ces femmes et ces enfants qui demandent juste un peu d'amour, de considération, pour avoir l'impression qu'ils sont encore des être humains aux yeux de ceux qui les regardent derrière leurs écrans, comme des bêtes du zoo médiatique qui nous distraient de notre vie d'esclave du consumérisme. C'est ce consumérisme qui frappe à nos portes pour cette période approchante de Noël au travers de tous ces catalogues de jouets. Les jouets, combien de ces enfants et orphelins migrants en auront pour leur redonner un sourire souvent perdu sur ce chemin de l'exil et de la souffrance ? Combien de ces enfants recevront un jouet nouveau pour remplacer celui perdu ou laissé au milieu des ruines de sa maison ou des détritus d'un camp ou d'une "jungle" ? Combien seront nous à offrir un peu de notre temps et ou de notre argent pour offrir un sourire à un enfant qui aurait pu être le nôtre si la vie avait décider de nous faire naître là-bas plutôt qu'ici ?

 

Ainsi en pensant un peu à eux et à elles par des actes concrets, leur Noël en terre d'ailleurs aura un peu plus le goût de Noël que de Toussaint. A votre bon coeur Mesdames et Messieurs…

Jouet 001

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